L'acier et la sécurité incendie : difficile à concilier dans la perception de nombreux concepteurs. Cependant, rien n'est plus sûr qu'un bâtiment en acier dont la sécurité incendie a été vérifiée. Le large éventail de solutions permet au concepteur de trouver une solution fiable et économique pour chaque bâtiment et chaque attente.
L’acier est un matériau ininflammable. L’acier ne brûle pas et ne dégage ni chaleur, ni fumée.
Cependant, à des températures comme celles que l’on peut rencontrer en cas d’incendie dans un bâtiment, l’acier perd une partie de sa résistance et de sa rigidité. Lorsque l’acier atteint une température de 400 °C, la résistance diminue, mais c'est pareil pour d'autres matériaux.
N’importe quelle résistance au feu peut être atteinte en prenant les bonnes mesures. En outre, l’acier offre une grande sécurité pour les raisons suivantes :
Les mesures actives regroupent toutes les mesures qui empêchent un incendie naissant de se développer complètement. Les mesures les plus connues sont : détection et alarmes, sprinklers, installations d'évacuation des fumées et de la chaleur (EFC) ;
Les mesures passives englobent toutes les mesures destinées à augmenter la résistance au feu de la construction en acier. Les possibilités sont :
Le moment de rupture de l’acier dépend de :
En réalisant des constructions en acier plus lourdes que la valeur nécessaire en conception « à froid », la rupture se produira à une température plus élevée et le facteur de profilé (et donc la vitesse de réchauffement) diminuera. Les deux effets retardent le moment de la rupture de la construction. Le surdimensionnement peut être une solution très économique, surtout pour les exigences de 15 ou 30 minutes.
La température critique est la température à laquelle se produit la rupture de l’acier. Elle dépend du taux de charge. Il s’agit du rapport entre la charge pesant sur la construction pendant l’incendie et la capacité portante initiale.
La vitesse de réchauffement de la construction en acier ne dépend pas seulement de l’évolution de la température de l’incendie, mais aussi du rapport entre la surface extérieure chauffée (A) et le volume d’acier (V). Un profil massif présentant une surface extérieure réduite chauffera plus lentement qu’un profil léger chauffé sur une surface extérieure plus grande. Ce rapport est représenté par la massivité (V/A exprimée en mm) ou, à l’inverse, par le facteur de profilé (A/V exprimé en 1/m). Cette deuxième définition est utilisée dans les Eurocodes.
En cas d’incendie dans un compartiment d’incendie, une structure de colonnes placée hors du bâtiment n’est chauffée que par le rayonnement des fenêtres et par les flammes éventuelles qui en sortent. De plus, la colonne évacue beaucoup de chaleur par rayonnement dans l’air extérieur.
En évitant de positionner les colonnes directement devant les fenêtres, leur réchauffement reste limité. De cette manière, la structure peut être construite sans isolation ignifuge pour obtenir une résistance au feu de 120 minutes. Dans la partie 1991-1-2 des Eurocodes se trouve une méthode de calcul pour évaluer la résistance au feu. Cette solution peut aussi être économique grâce à une structure en acier inoxydable, et ce malgré le coût plus élevé de ce matériau ; en effet, les propriétés mécaniques à haute température sont meilleures que pour l’acier ordinaire et le matériau est plus durable.
L’intégration architecturale est une manière très répandue de protéger l’acier contre le feu de façon économique. La structure en acier est entièrement ou partiellement intégrée au reste de la construction ; de ce fait, la structure n’est pas chauffée par l’incendie ou alors de façon limitée. Cette intégration permet également de réaliser des sols et des parois planes qui économisent l’espace et facilitent le placement des canalisations et des équipements.
Les colonnes et les poutrelles peuvent aussi être coulées dans le béton, entièrement ou partiellement. Différentes méthodes de calcul pour différents types de poutrelles et de colonnes sont données dans les Eurocodes (partie 1994-1-2). De cette manière, on peut atteindre une résistance au feu de 120 minutes.
Les profilés creux peuvent être remplis de béton. Pour calculer leur résistance au feu, dans le cadre de CIDECT, le logiciel POTFIRE a été développé.
Pour que l’acier parvienne à la résistance au feu désirée, une méthode très courante consiste à protéger la structure contre le feu au moyen d’une isolation ignifuge. Il existe différents matériaux d’isolation :
Pour chacun de ces matériaux, l’épaisseur nécessaire dépend de la température critique et du facteur de profilé de la structure en acier.
Les épaisseurs sont données dans une fiche technique. Les fiches techniques des matériaux d’isolation se basent sur une série d’essais au feu destinés à étudier le comportement isolant du matériau et la mesure dans laquelle celui-ci reste fixé à la structure en acier durant l’incendie. Les résultats des essais sont traités mathématiquement pour obtenir des valeurs de conception pour les épaisseurs d’isolation nécessaires. En fonction des méthodes d’essai et de calcul, il peut exister plusieurs fiches techniques pour le même matériau. Néanmoins, les valeurs de conception de toutes les fiches techniques se trouvent toujours du côté de la sécurité par rapport aux résultats des essais.
Afin de donner à la structure la résistance au feu désirée et de laisser malgré tout l’acier apparent, on a souvent recours à l’application d’une couche de peinture intumescente. La peinture gonfle lorsqu’elle est chauffée et forme une couche isolante qui ralentit le réchauffement de l’acier.
L’épaisseur de la couche dépend de la résistance au feu désirée. La peinture peut être appliquée en une ou plusieurs couches de quelques dixièmes de millimètres, en atelier ou sur chantier. L’épaisseur se contrôle facilement au moyen d’une jauge d’épaisseur conçue à cet effet.
Bien qu’une résistance au feu de 120 minutes puisse être atteinte, la méthode s’applique le plus couramment pour des exigences de résistance au feu de 30 et 60 minutes.
Les panneaux coupe-feu sont traditionnellement souvent utilisés et ils permettent d’obtenir n’importe quelle résistance au feu. Il existe des panneaux à base de plâtre (armé de fibres), de silicate de calcium ou de laine minérale. Les plaques à base de plâtre ou de silicate de calcium sont tout à fait adaptées pour le travail en apparent.
Une bonne fixation est essentielle au panneautage afin que les plaques puissent suivre les déformations de l’acier durant l’incendie. Les dimensions des plaques, leur type et l’interdistance des fixations doivent être conformes aux prescriptions de la fiche technique.
Les mortiers projetés sont mis en œuvre sur chantier et permettent d’atteindre n’importe quelle résistance au feu. Les mortiers projetés peuvent être une solution très économique, mais la surface du mortier est rugueuse et donc moins adaptée pour les surfaces apparentes.
Afin d’assurer une bonne adhérence, l’acier doit généralement d’abord être sablé et recouvert d’une couche anticorrosion. Les informations relatives à ce point se trouvent dans la fiche technique.
Les profilés creux peuvent être protégés contre le feu (120 minutes et plus) de manière efficace en les remplissant d’eau. La circulation de l’eau est essentielle afin d’évacuer la chaleur et d’empêcher l’eau de bouillir. La circulation peut être démarrée de manière naturelle grâce à la montée locale de l’eau chauffée par le foyer d’incendie. Le système est surtout efficace pour des colonnes se trouvant dans des immeubles relativement élevés. De cette manière, on peut réaliser une construction très élancée et avenante.
Les exigences ‘incendie’ reprises dans la réglementation ont pour objectifs :
Afin de rencontrer ces objectifs, les différentes réglementations contiennent des exigences relatives :
Pour ce qui concerne les éléments de construction en acier, 2 aspects essentiels sont à considérer :
Les exigences principales en matière de capacité portante proviennent essentiellement de 2 textes prescriptifs :
Le RGTB est en train d'être remplacé partie par partie par le Codex ; toutefois, à l'heure actuelle, les parties relatives à la prévention des incendies sur le lieu de travail n'ont pas encore été remplacées et l'article 52 du RGTB continue de s'appliquer.
En outre, des réglementations distinctes existent pour certains types de projets spécifiques.
Les prescriptions des Normes de Base ont initialement été fixées dans l’arrêté du 7 juillet 1994. Celui-ci a fait l’objet de nombreux arrêtés royaux modificatifs.
Le texte du RD lui-même tient sur un A4. Le contenu technique se trouve dans une série d'annexes. Ces annexes sont structurées comme suit :
Dans le secteur de la construction, on utilise par exemple le terme "exigences conformes à l'Annexe 6" (en supposant que tout le monde comprenne que dans le contexte de la sécurité incendie, cela signifie "annexe 6 de l'arrêté royal du 7/7/94").
Une première distinction est faite entre les bâtiments industriels et non industriels.
Les bâtiments non industriels sont ensuite classés en fonction de leur hauteur. La notion de hauteur est spécifique aux normes de base :
[figure hauteur :
Pour les bâtiments industriels, la classification se fait en fonction de la charge d'incendie attendue d'une part, et de l'importance de l'élément structurel en cas d'effondrement (par le feu) d'autre part. Ceci est expliqué plus en détail dans la rubrique Bâtiments industriels (Belgique).
Après que les exigences pour la construction aient été fixées, c’est la résistance au feu de la construction qui doit être déterminée. Selon les normes de base, la résistance au feu doit être démontrée d’une des manières suivantes :
Le RGPT s’applique à l’ensemble des bâtiments dans lesquels des personnes sont occupées dans le cadre de leur travail.
Le niveau d’exigence varie :
Sur le site web dus SPF Emploi, Travail et Concertation sociale, qui est responsable de la mise en œuvre du RGPT, se trouve une compilation des informations complémentaires utiles.
Parfois, il est presque impossible de se conformer aux exigences des Normes de Base, ou certaines exigences strictes s'appliquent à un projet spécifique présentant peu de risques. Les dérogations sont admises si un niveau de sécurité au moins égal est offert, comme exigé dans les règlements.
Pour juger les dérogations aux normes de base, le SPF Intérieur a érigé une commission de dérogation.
La procédure a été modernisée en 2018 afin de rendre plus fluides la soumission et l'examen d'un dossier de dérogation.
Pour une série de destinations spécifiques, des règles supplémentaires ou différentes existent au niveau fédéral, régional et européen. Les plus importantes d'entre elles sont :
Le CSTC a developpé une page web sur laquelle la législation pertinente est affichée en fonction de la destination d'une part, et de la région d'autre part.
Il faut également garder à l'esprit qu'il est toujours possible qu'il existe également des réglementations municipales.
Au Luxembourg, les exigences en matière de sécurité incendie pour les bâtiments sont définies par les règles de la loi sur la sécurité dans les bâtiments publics du "Règlement Grand-Ducal" et de l'ITM (Inspection du Travail et des Mines) documentées dans l'ITM-SST 1500 et suivantes :
Le titre officiel du « Règlement Grand-Ducal » se lit : "Texte coordonné du 3 novembre 1995 du règlement grand-ducal modifié du 13 juin 1979 concernant les directives en matière de sécurité dans la fonction publique" et peut être téléchargé sur le site-web du Journal Officiel. Les prescriptions de l’ITM sont à consulter ici.
Selon la réglementation luxembourgeoise, la classification principale est basée sur la hauteur du bâtiment, ce qui conduit à des règles pour les bâtiments de faible hauteur, de hauteur moyenne et de grande hauteur. Il existe ensuite des règles supplémentaires pour les occupations telles que les bâtiments administratifs, les restaurants, les parkings, les théâtres, les centres commerciaux, les hôtels, les hôpitaux, les piscines, les écoles, les crèches et les chantiers.
Pour les bâtiments industriels, il faut tenir compte de la réglementation ITL-SST 1511.2 pour les halls industriels de moins de 10.000 m².
Quatre documents spécifiques sont spécialement dédiés à l'approche de la performance et couvrent la stabilité structurelle, le désenfumage et l'évacuation des personnes et des façades :
Pour les bâtiments non industriels, l'exigence de résistance au feu est principalement basée sur la hauteur du bâtiment :
La manière traditionnelle de démontrer qu'une structure est sûre en cas d'incendie consiste à "imposer" une courbe de température spécifique aux composants d'une structure, puis à démontrer qu'une résistance suffisante est atteinte par l'une des 4 méthodes suivantes :
Ces 2 hypothèses simplifiées (feu standard et approche par composant) peuvent cependant être abordées plus précisément, respectivement avec un feu naturel et avec une approche par système. C'est ce que nous appelons l'ingénierie de la sécurité incendie.
L'ingénierie de la sécurité incendie est très souvent associée à la construction métallique. Mais pour d'autres matériaux, une approche avec l'ingénierie de la sécurité incendie est également possible.
Comment se fait-il que le FSE soit souvent associé à la construction métallique ? L'explication est très simple :
La conception correcte d'une structure métallique résistante au feu est un sujet qui reste souvent (dans les formations) peu abordé. C'est pourquoi Bouwen met Staal, Infosteel, Worldsteel, Bauforumstahl et SZS ont uni leurs forces pour publier un livre que tout concepteur (junior ou senior) devrait avoir à portée de main lorsqu'il conçoit des structures en acier : Steel Design 2 - Fire.
Il y a également un Steel Design 1 dans cette série, à savoir "Structural Basics" qui traite les fondements de conception des structures en acier en condition normale.